samedi 3 janvier 2009

Sports Light

Le problème, c'est que je suis romantico-concon je crois. Et quand je dis ça, je ne pense pas du tout à ce qui se passe (ou pas) dans ma vie privée. Je songe plutôt aux rencontres que je fais parfois dans mon métier et qui stimulent une partie de mon imagination. Ces rendez-vous qui tortillent mon estomac dans tous les sens de longues minutes après l'entrevue.... Une part de moi qui s'est éveillée devant mon écran de télé quand j'ai pris la baffe The West Wing en pleine figure, ou quand je voyais Yannick Dahan gesticuler dans tous les sens pour défendre tel ou tel film dans Opé Frisson. J'aime, je vénère les idéalistes, les jusqu'au-boutistes qui donnent envie de lever le nez et de voir plus loin.
Juste avant les vacances, j'en ai croisé un.

"Je fais parfois des choses qui défient la logique"

Il est Bosniaque, entraîneur d'une équipe de sport collectif, connu pour sa très grande rigueur professionnelle. Un mec exigeant, qui ne laisse rien passer ou presque. On avait convenu de se voir pour faire le point sur une année très chargée pour lui et son équipe. Et cette nouvelle claque salutaire, je l'ai prise d'entrée de jeu. Je lui ai demandé s'il avait obtenu les garanties qu'il avait demandées pour rester à son poste, après une année faste et alors qu'un énorme défi (confirmer) se présentait à lui. En été, il avait en effet affirmé qu'il ne repartirait pas pour un tour s'il ne recevait pas suffisamment de soutien pour poursuivre son action.
Sa réponse est tombée d'un coup, nette. "Non. Rester ici en début de saison, c'était le choix du coeur. Je fais parfois des choses qui défient la logique alors que d'autres, dans les mêmes conditions, seraient partis (...) Il y a des sentiments qu'il faut parfois laisser de côté mais je n'y arrive pas..."

Merveilleuse inconscience

Oui, le problème, c'est que je suis romantico-concon. Parce que moi, ce genre d'attitude - quand écouter ses tripes, dans certaines situations, relève du choix franchement casse-gueule - eh bien je trouve ça beau. Se lancer un défi, prendre un risque en sachant que celui-ci a de vraies chances de ne pas être payant, c'est un peu de la merveilleuse inconscience. Sauf que le sport, c'est aussi une vraie aventure humaine. Et ce quadragénaire a foi en son équipe. Bien vu : ils ont déjà réalisé une partie du chemin.
On a parlé ensuite de son job, pour lequel il voue une vraie passion. Accaparante, exigeante. Ingrate aussi parfois. Notamment parce qu'elle a tendance à accélérer la fuite du temps...

Les lumières du stade, "et là..."

C'est donc aussi beau qu'effrayant. Car ce métier, expliquait-il, "je ne veux pas faire ça trop longtemps. Il y a aussi le reste de ma vie : ma fille à 19 ans et je ne l'ai pas vue grandir. Je le regrette beaucoup. Mes parents me manquent aussi. Cela fait plus d'un an que je n'ai pas pris de vacances. Quand j'ai un coup de blues, j'ai envie de tout lâcher. Et puis, je retrouve toutes ces sensations que l'on a dans un stade plein et là..."
J'espère qu'il va réussir son pari. Pour l'histoire, belle à raconter. Pour l'homme, attachant et attaché à ses joueurs et ses idées. En tout cas, ces propos m'ont fait vibrer. Ils me rappellent aussi l'importance de faire la part des choses. Pour développer tous les pans d'une vie. Si possible plus tôt que lui. Mais cet homme a-t-il vraiment fait ce choix ou a-t-il été happé par sa passion ?

Bien à vous,
Benny

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