dimanche 30 mai 2010

"Mad Men" (saison 1) : That 60s show

New York, début des années 60. L'agence publicitaire Sterling Cooper a le vent en poupe. Ni trop grande ni trop petite, elle fait partie de ces structures vers lesquelles les grosses sociétés se tournent quand il s'agit de vendre l'American way of life avec les produits qu'elles fabriquent. Cigarettes, rouge à lèvres, appareil amincissant... Chez Sterling Cooper, on trouve les formules magiques de l'époque pour faire acheter tout et n'importe quoi. Même les politiques pensent à eux : c'est en effet vers ce bureau que se tourne le parti républicain pour que les Américains "achètent" la candidature de Nixon face à Kennedy.

Gary Cooper n'a jamais existé
Qui dit formules magiques, dit magicien. Celui de Sterling-Cooper s'appelle Don Draper (John Hamm). Un Grand brun taciturne, aussi magnétique, imposant que mystérieux. 
Draper, c'est un peu le soleil de l'agence de Manhattan. Autour de lui gravite toute une série de personnages dont les personnalités s'inscrivent véritablement en complément ou en opposition au "fils de pub". Qu'il s'agisse de Roger Sterling, le boss dont il est très proche, ou de Pete Campbell, jeune publicitaire mesquin et aux dents longues, mais qui porte comme un poids son manque d'envergure.
Draper, c'est aussi et surtout "ce Gary Cooper que regrette Tony Soprano « The strong, silent type »" dans la série de David Chase, The Soprano. La formule n'est pas de moi : elle est de Dominique Montay, auteur d'un excellent article de présentation de la série pour pErDUSA. En une formule très pertinente, il met le doigt sur LE truc, la spécificité du show.
Authentique immersion dans une période mythique de l'Amérique, Mad Men c'est un peu la série sœur des Soprano. Une fiction pour laquelle Matthew Weiner, créateur du show, fut scénariste en saison 5. On pourrait presque croire que ce dernier a imaginé sa série pour répondre au mafieux du New Jersey. Qu'est-ce qu'est devenu l'homme fort et silencieux dont l'image a nourri les imaginaires ? A travers Mad Men, Weiner lui répond que l'icône n'a sans doute jamais existé. Ou tout au moins qu'elle aussi était en proie à ses démons. Aux mêmes questionnements, au même vide que lui. En la matière, il en va de Draper comme pour tous ses collègues.

Les regards des Mad Women
Parce  que les années 60, ce sont celles de tous les glissements. La société est en train de changer et ce sont les magnifiques portraits de femmes esquissés dans la série qui le démontre. Qu'il s'agisse de Penny (Elisabeth Moss), la jeune secrétaire qui débarque dans le pilote de la série, Joan Holloway (Christina Hendricks), véritable figure de proue des femmes qui travaillent chez Sterling-Cooper, ou Betty (la lumineuse Junuary Jones), la femme de Don: toutes participent à ce phénomène.
Pas en montant au créneau dans un monde fait par les hommes pour les hommes mais en faisant découvrir au spectateur comment ces demoiselles et cette dame vivent la situation. Comment elles composent avec et comment, parfois (mais pas souvent) elles agissent dessus. Et ça, c'est vraiment bien : l'auteur joue entre en connivence avec l'audience qui sait que tout va bientôt changer... sans pour autant être lourdot dans la démonstration.

Voyage dans le temps ralenti
Si Mad Men est foncièrement subtile, c'est aussi parce que c'est une fiction qui prend son temps. C'est même carrément un show très lent, dans lequel les auteurs développent méticuleusement leurs personnages et les intrigues, pour mieux faire jaillir l'émotion. Le final de Carrousel, dernier épisode de la saison 1, en est un brillant exemple.
Pour renforcer la puissance de son propos, la série s'appuie sur une production design absolument époustouflante : les décors et la photographie sont particulièrement soignés et c'est ce qui crée une atmosphère vraiment singulière. L'air n'est pas toujours saturé par les volutes de fumée de cigarettes mais ce sont surtout les âmes qui sont dans le flou...

Bien à vous,
Benny

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