samedi 29 mai 2010

La mystification "The West Wing"


Je suis en train de regarder la fin de la saison 7 de The West Wing et à mesure que l'on s'approche du dénouement (je viens de voir le 18e épisode, Election Day, part II), je dois dire que je nourris une certaine appréhension.
Je suis en train de me rendre compte que c'est vraiment ma série culte. Celle qui correspond peut-être le plus à ce que j'aime. Je crois qu'elle trouve en moi un écho singulier, nourrissant une part de ce que je suis ou de ce que, parfois, je voudrais être. Alors oui : voir les derniers inédits, c'est très particulier.
Ca me renvoie à la découverte du show au début de l'été 2001 (la vache...), alors que je commençais tout juste à faire mes premiers pas à la BennyCorp. Et ça me rappelle essentiellement le rapport amour/haine que suscite souvent chez moi Aaron Sorkin.
Parce que si j'ai beau adorer sa série, il y a tout de même un certain nombre de choses qui m'ont toujours fait (un peu) tiquer.

Vous avez dit "sentiment de supériorité" ?
Ce n'est pas un scoop : The West Wing, c'est une série foncièrement idéaliste. Un show qui magnifie la capacité des hommes (et des femmes) à se dépasser, à voir toujours plus loin pour mieux défendre ce en quoi ils croient. C'est beau. Mais c'est aussi un formidable prétexte pour endormir la vigilance du téléspectateur et lui faire avaler ce qui s'apparente parfois à de belles couleuvres. Notamment la tendance des personnages à faire inconsciemment preuve d'un sentiment de supériorité.
Un exemple ? Quand, en saison 1, Bartlet songe à venger la mort de son médecin Morris Tolliver en lançant une riposte armée. Ceci alors que des millions de personnes d'autres pays meurent en mission chaque jour mais ne connaissent pas le président des Etats-Unis.
C'est la même chose en saison 2, après l'attaque de Roslyn. Quand Leo McGarry est en plein briefing dans la salle des crises, et qu'on lui demande ce que l'on doit dire aux pays étrangers alors que Bartlet vient de prendre une balle. "Dites leur de ne pas nous faire chier aujourd'hui", balance le secrétaire général de la Maison Blanche.
Dramatiquement, ça le fait. Et en même temps (je ne sais pas si c'est une lecture très française de la chose. Peut-être), ça nous rappelle de manière sèche et balourde que l'on est dans une fiction. Pour ne pas dire un théâtre de marionnettes dont on discerne bien les fils. Façon "Oh bichette, vous avez vu : lui aussi, il est humain".
Par à coups, Sorkin suscite ainsi l'émotion de manière facile, alors qu'il est dans le même temps capable de nourrir ses scripts de références culturelles fouillées et d'éléments subtiles. Tout ça pour nous immerger dans une histoire souvent très crédible. Paradoxe.

Un auteur sur un fil fragile
L'idéalisme, c'est aussi parfois bien utile pour boucler un arc d'épisodes quand on se retrouve au pied du mur. Comme en saison 3, lorsque Sorkin doit boucler la storyline sur les conséquences juridiques de la maladie de Bartlet. L'épisode est bien écrit, il est 100% à l'image de son auteur : brillant et malin dans ses dialogues, mais assez facile dans son conclusion (que l'on résumera par "Oh bichette, l'attorney républicain lui aussi il a un coeur". Eh oui, encore).
En même temps, tout ça était dit dès le pilote avec la polémique créée par Josh avec une organisation de bigots. Le message de la série, par certains aspects, c'est "Ici, on va stimuler votre réceptivité de téléspectateur, on va vous vendre de l'idéal mais pour ça, n'oubliez jamais que vous êtes dans une fiction".
Ce qui fait que ça marche malgré tout ? La qualité d'écriture, très largement au-dessus du lot. La finesse des portraits esquissés et la cohérence de l'utilisation des personnages (les interactions sont multiples mais toujours efficaces). Tout ce qui fait qu'une fiction devient une grande fiction, toujours fidèle à son propos inaugural. En un sens, on peut dire qu'elle est mystifiante.
La chance de Sorkin sur cette série, c'est aussi qu'il reste droit sur un fil très fragile. Son propos trouve un écho favorable chez le spectateur parce qu'il ne tombe pas trop dans le corollaire de l'idéalisme. Lequel à un nom : passer pour un donneur de leçons (ce qui arrive, hélas, dans deux tiers de sa série suivante, Studio 60).

Wells done
Avec Wells, cette particularité reste au coeur des scripts. Mais le producteur d'Urgences et son équipe n'ont pas toujours la vista narrative de Sorkin. C'est ce qui explique que la saison 5 est si souvent décriée par les fans. Les saisons 6 et 7, qui développent un nouveau show dans le show (la course à la présidence), renouvellent en cela adroitement le propos. Elles atténuent surtout un autre défaut des débuts : la vision très manichéenne de la politique américaine. Avec Vinick, les Républicains apparaissent moins comme d'infâmes bastards, et c'est bien vu.
Mais je m'arrêterai là : Arnaud J. Fleischman m'avait donné pour gage de faire une critique des défauts de The West Wing. Ce qui est sûr, c'est que je n'aime pas la série malgré ses défauts mais parce que l'équation "points positifs + points négatifs" en fait un objet unique, fort et émouvant.
Pour la critique de la saison 7, rendez-vous début juillet.
Moi, je vous laisse: je dois aller prendre une douche. Je me sens sale à la relecture de ce post.

Bien à vous,
Benny

3 commentaires:

Arnaud J. Fleischman a dit…

Mission accomplie, et avec talent.
bravo l'artiste

Benny a dit…

Merci, merci, merci...
(Je révérence tout seul devant mon écran)
Bon, maintenant j'ai envie de dire : suivante ! ^^

A la Maison Blanche...encore ! a dit…

C'est également une série culte pour moi je ne me lasse jamais de la regarder, là je suis au début de la saison 6 !!!!

Je suis tout à fait d'accord pour la saison, on sent beaucoup la différence, mais ça reste toujours The West Wing

De plus selon moi, Rob Lowe manque beaucoup dans les dernières saisons