lundi 14 février 2011

Pilote contre Pilote: "Detroit 1-8-7" vs. "Southland"

Aujourd'hui, on va donner dans l'étude comparative. Et on va surtout donner dans un genre que j'apprécie tout particulièrement, le cop show. En s'intéressant à une série toute récente (Detroit 1-8-7 a démarré sur ABC en septembre) et une qui n'est pas si vieille que ça (Southland date de 2009,annulée par NBC en saison 2, elle a été reprise de justesse par TNT).
Une chronique en forme de banc d'essai qui est avant tout l'occasion de voir où en est la production de séries policières sur les grands networks. Alors que le genre a déjà été revisité 3876 fois, alors que le câble a donné une nouvelle dimension à cette catégorie (HBO avec The Wire, FX avec The Shield), que reste-t-il en effet aux cop shows des grands prime time ?

Detroit 1-8-7, l'hommage ratisse large

Dans les années 90 et 2000, il y a eu le Maryland et Baltimore. Pour les années 2010, ce sera le Michigan et Detroit affirment Jason Richman (créateur du show) et David Zabel, producteurs exécutifs d'une série qui s'inscrit dans la pure tradition des cop show des années 90.
Le pilote de Detroit 1-8-7, c'est en effet un condensé assez efficace de NYPD Blue et de Homicide. A la première, on emprunte la nervosité de la mise en scène (léchée mais accessible, on est pas dans The Beat de Levinson et Fontana, plombée par une surenchère d'effets), le rythme de l'intrigue, les sous-intrigues sentimentales... et un acteur (James McArthur, qui jouait le lieutenant Fancy dans NYPD Blue et interprète un inspecteur un peu revenu de tout). Mais la série reprend surtout le principe du faux ensemble show: on a certes ici trois équipes d'inspecteurs et un lieutenant, mais il ne fait aucun doute que l'axe de la narration, le point autour de quoi (et de qui) tout tourne, c'est l'inspecteur Louis Fitch. Un personnage secret incarné de façon efficace par Michael Imperioli. Très vite, on sent que la série a été construite autour de ce rôle.

Le bon vieux cahier des charges en second plan

A la seconde série citée plus haut, Detroit reprend le principe des duos-couples, les équipes d'inspecteurs qui se complètent plus ou moins bien mais donnent de la matière à l'histoire. Comme elle affirme la même volonté d'immerger le téléspectateur dans la réalité d'une ville bouffée par la crise. Suprême hommage qui n'aura pas échappé aux fans d'Homicide, la salle des inspecteurs de Detroit 1-8-7 a son propre tableau des affaires, récapitulant où en sont les différentes enquêtes en cours. Comme chez le lieutenant Al Giardello.
 Une combinaison plutôt adroite... mais qui veut surtout fédérer un maximum de téléspectateurs. Homicide n'a jamais été un vrai succès d'audience. D'où la volonté des producteurs des aventures de Fitch et sa bande de picorer mais en rendant les choses plus sexy.
Et pour ça, quoi de mieux pour cela qu'une scène de prise d'otage finale qui met le héros sous le feu des projecteurs ? Un procédé plutôt facile, qui peut faire grimacer car too much. Mais ce n'est pas la première fois qu'on voit ça dans un pilote. Vous savez, c'est un peu comme ces scènes finales sanglantes qui doivent vous donner envie de voir la suite... Tiens, c'est marrant: c'est justement ce qui arrive dans cet épisode. Et ça arrive un peu n'importe comment.
Dommage, ça gâche un peu le plaisir de l'ensemble. Mais ça n'entame pas l'envie de voir la suite.

Southland, embarquement immédiat

Un pilote qui commence avec une chanson qui tue, ça le fait toujours. Du coup, en entendant les premières notes de School de Supertramp dès les premières images, il se peut que mon jugement ait été légèrement altéré. Surtout qu'en plus, je fondais de gros espoirs sur cette série produite par John Wells et créée par Ann Biderman (ex-scénariste de NYPD Blue).
Le fait est que là aussi, on est dans le registre de l'hommage. A mort. En embarquant à bord des voitures de patrouille des flics de Los Angeles, on retrouve un peu l'atmosphère de Third Watch (autre série phénomène de Wells) et, dans une certaine mesure, celle de The Shield. Avec des flics en uniforme (John Cooper, un vieux de la vieille, et Ben Sherman, le bleu : ou quand Sully et Davis se rappellent à notre bon souvenir) ou avec des inspecteurs (King et Clarke; mais aussi Bryant et Moretta de l'anti-gang), l'idée est d'appréhender la criminalité sous ses multiples formes, de mettre en lumière la misère des quartiers sud de LA et de poser des personnages qui ont du charisme.
Le contrat est rempli. Pas de manière particulièrement novatrice, loin s'en faut, mais le script prend le temps de poser les contradictions, les dilemmes de chacun des héros de manière plaisante. Là non plus, il n'y a pas de quoi raser la tête de Lady Gaga (Sherman, par exemple, est fils d'avocat: il est à son commissariat ce que John Carter pouvait être au Cook County) mais l'ensemble est suffisamment dynamique pour que l'on se laisse porter. L'avant-dernière scène, celle de la lettre, est sans doute too much... mais elle n'enlève rien au plaisir suscité par le visionnage de cet épisode inaugural.
California love...

Conclusion ? Si elle prend un poil plus de risque, si elle ne fonce pas droit dans le mur du soap (méfions-nous de David Zabel... capable du meilleur comme du pire sur Urgences), Detroit 1-8-7 possède de vraies qualités pour imposer son univers. Mais en la matière, Southland avait sans doute un peu d'avance. Car on accroche plus vite aux aventures des flics californiens. La raison? Le script est plus subtil, comme la personnalité de Cooper. Tout simplement.

Bien à vous,
Benny

4 commentaires:

Stéph a dit…

J'ai commencé à suivre Detroit 1-8-7 depuis que Canal+ la diffuse le jeudi soir, mais j'avoue n'être que très moyennement enthousiaste. Bien entendu toutes les séries policières ne peuvent pas être du niveau d'un The Shield, mais là ce qui me manque pour vraiment accrocher c'est clairement de la profondeur dans les personnages. Il n'y a guère que Fitch qui donne envie d'en savoir plus à son sujet, les autres... bof. Quant aux enquêtes là non plus pas de grands tours de force en vue pour l'instant. Je trouve que la série (je dis ça après 6 épisodes vus) peine à trouver un ton personnel et accrocheur, ou alors c'est moi qui suis passé à côté !

Benny a dit…

@ Stéph

Pour tout dire, c'est un peu ce que je redoutais. Mais je vais quand même voir la suite : ne serait-ce que pour voir si je suis d'accord avec toi.

Et... bienvenue ! N'hésite pas à commenter à loisir : c'est toujours appréciable :)

Stéph a dit…

Je continue moi aussi à regarder, et pour l'instant... toujours rien de spécial. C'est pas mauvais, loin de là, c'est juste que ça manque d'âme. Bon, ça arrive qu'une série mette du temps à trouver le juste ton, mais parfois aussi il y en a qui ne trouvent jamais... Peut-être en se concentrant un peu plus sur les personnages qui restent somme toute assez banals (Fitch excepté).

Bah, sinon je vais tranquillement attendre la nouvelle saison de Dexter qui ne saurait tarder !

Je ne suis pas ton blog depuis longtemps, je suis tombé dessus par hasard en janvier, mais j'ai pu remarquer qu'en matière de séries télé on a des goûts assez proches. Alors oui, s'pourrait bien que je comente encore par ci par là ;)

r lefourbe a dit…

J'adore déterrer des vieux posts et y apporter mes commentaires.
Car oui, je viens de regarder 4 épisodes de Detroit 1-8-7.
Alors que dire : pas grand chose. J'aime parce que on n'a pas l'impression d'être dans NCIS ou CSI. Et ça c'est déjà un grand plus depuis quelques années.

A propos de l'hommage à Homicide, en plus du tableau il y a quand même beaucoup de clin d'oeil appuyés (qui a dit plagiat). Le chef qui parle italien et qui veut s'acheter uen maison e Toscane ? Le Lieutenant Giardello n'était pas italien lui aussi ?
1er jour pour Washington à la brigade criminelle ? Et Bayliss alors, lui aussi ne venait pas de commencer quand dans la S1 d'Homicide
Bref, après Homicide je ne vois pas beaucoup d'innovation. Les enquêtes policières sont correctes. Il y a de l'humour aussi. Juste ce qu'il faut. Quelques problèmes avec la musique. Lorsque le beau gosse raconte la mort de son frère au combat, on a droit à des violons. Mouais :-/

Enfin, ce que je trouve très agréable c'est Detroit. Comme pour Baltimore, cela change de NY et de LA. Pour ceux qui veulent retrouver l'ambiance de la ville : 2 photographes ont fait un boulot fantastiques à ce sujet. On a du mal à imaginer de tels bâtiments à l'abandon en plein centre ville. 4ème ville des USA dans les années 30. Maintenant 11 ou 12ème. La roue tourne.

http://www.marchandmeffre.com/detroit/index.html