mercredi 4 novembre 2009

Mon père, cet homme en slip dont je suis fier

Aujourd'hui, c'était jour de gloire. Mon père était dans le journal local : il témoignait, photo à l'appui, alors que des gens s'amusent à couper les barbelés des clôtures qui entourent les champs du village où j'ai grandi. Article annoncé en une du quotidien, s'il vous plaît.
J'adore mes parents. Je ne suis pas vraiment famille mais eux, je les admire, je les respecte et surtout, je leur voue une énorme tendresse (Signe nunuche évident : je souris devant mon écran rien que de l'écrire. C'est dire...). Cela étant, si je tiens mon caractère de ma mère c'est vrai que pendant un long moment, je me suis demandé ce qui nous liait mon père et moi.

Le contraste et la météo

Pour en avoir parlé avec des amis, je me suis rendu compte que les relations père/fils sont souvent complexes. Dans mon cas, j'ai longtemps été habité par une angoisse : celle que mon géniteur et moi, on se loupe. On s'est toujours bien entendu, on ne s'est jamais engueulé mais j'avais la trouille que l'on arrive jamais à échanger vraiment. Pour moi qui suis quelqu'un de vachement bavard, qui aime mettre des mots sur les émotions, c'était très troublant d'être face à un homme très pudique et peu affable. Pas forcément réservé mais pas tellement taillé pour les longues discussions, les confidences.
Mon père est agriculteur et l'univers de la terre n'est pas celui où l'on exprime le plus facilement ses émotions. Pendant des années, lui et moi, on parlait du temps et je le vivais vraiment pas bien.
Et puis un soir (ça date de pas si longtemps que ça : trois ans je crois), alors que je regardais un DVD de série, je vois mon père qui passe, en slip dans le salon, et fait un aller-retour à la cuisine avant de filer à la salle de bains. Il était une heure du matin et il se levait pour aller aux écuries pour voir si une de ses vaches allait mettre bas cette nuit.

Tout en gestes

Je n'ai rien dit mais ça a été une claque. J'ai enfin compris, à 28 ans, que ce qui nous liait mon père et moi, ce ne sont pas des mots que j'attendais vainement. Ce sont des actes. Le goût du travail bien fait, l'opiniâtreté à faire correctement ce qui doit être fait, ce n'était pas seulement ce que ma mère m'a inculqué en me répétant quand j'étais gosse, "Si tu dois faire quelque chose, fais le bien". C'est aussi ce que mon père réalise tout le temps, jour après jour. Et, modestement, je m'efforce de faire comme lui.
Depuis cette nuit-là, je vis les choses beaucoup plus simplement. J'appréhende nos "moments" avec plus de justesse sans doute. Je sais ce qui nous lie tous les deux. Aujourd'hui, on parle toujours du temps... mais je le vis beaucoup mieux parce que je perçois, entre deux phrases sur le manque de pluie, tout ce qu'il y a autour de ces mots. Du coup, il me semble que je montre mieux cet attachement.
Ce matin en regardant le journal, j'avais à nouveau six ans. Quand je disais à tout le monde à propos de mon père, alors qu'il passait en tracteur devant l'école, que c'est juste l'homme le plus fort du monde.
...
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Bon, dit comme ça, c'est hyper cucul mais c'est vrai. Alors, tant pis.

Bien à vous,
Benny

4 commentaires:

Une blonde dans la ville a dit…

D'abord, c'est même pas vrai. C'est mon père à moi le plus fort du monde.

(les relations pères fils sont complexes et souvent tendues, je te confirme, comme celles entre les mères et leurs filles, sauf que chez les filles, ça se voit plus, parce que les filles ça crie ça pleure et ça claque les portes)

Benny a dit…

Tu veux qu'on organise un combat de pères ? Je te le redis, Miss Blackberry : mon père a un tracteur... Le tien ne peut pas lutter, CQFD.

Une blonde dans la ville a dit…

Mouhahahaha ! Et alors ? Tu crois qu'tu nous fais peur ?
C'est mon papa le plus fort de tout l'univers.

Benny a dit…

C'est même pas vrai.

La qualité et la richesse de nos arguments me laissent songeur...