dimanche 13 décembre 2009

Dernier voyage à Isola

Les détours par les rayons livres de la Fnac vous réservent parfois de jolies surprises. Ils vous ramènent un peu à votre passé de lecteur et vous invitent à reprendre la route. C'est un peu ce qui m'est arrivé quand j'ai découvert il y a quelques jours que l'anthologie du 87e District d'Ed McBain comptait désormais un neuvième et dernier volume, avec les quatre derniers romans que l'auteur a écrit avant de disparaître.
McBain, le 87e District. Des flics, un commissariat, la ville d'Isola. Cinquante ans d'écriture et d'évolution sociale et culturelle aux Etats-Unis retracés en presque autant de polars. Du roman à suspense bien calibré de l'après-guerre au polar inscrit dans un contexte sociétal finement décrit. Et puis pour moi, des heures et des heures et des heures à dévorer ces romans dans le train avant et après le travail.

Le père de la narration sur petit écran

Ed McBain, de son vrai nom Salvatore Lombino, est Américain. Scénariste des Oiseaux, d'Alfred Hitchcock, on lui doit aussi un roman, Graine de Violence, dont l'adaptation cinématographique a elle aussi fait date (The Blackboard Jungle, de Richard Brooks). Son coup de génie, en 1956, n'est pas simplement de lancer une série de romans reprenant les mêmes personnages. C'est bel et bien d'instaurer une narration à double détente, avec d'une part des histoires bouclées et plongées dans la réalité de l'univers policier, et d'autre part une description continue de la vie de ses héros.
La narration télé, celle d'Urgences, celle de FBI : Portés Disparus ou encore The Shield, lui doit énormément. Et en France, on ne le sait que trop peu. Au fil des romans, on voit ainsi le héros Steve Carella se marier, avoir des enfants, perdre son père, tandis que ses collègues se retrouvent eux aussi confrontés aux drames et aux triomphes de l'existence.

Comme une petite musique
au fil des pages


Dans une ville imaginaire qui ressemble beaucoup à New York, l'oeuvre de McBain aura remarquablement évolué avec les années. Parce que son maître d'oeuvre est un créateur dans le sens le plus noble du terme : il est toujours en éveil, toujours en quête de points de vue, d'astuces narratives et de détails vrais susceptibles de nourrir son récit, de l'enrichir.
Son style est sans doute bien moins flamboyant que celui d'un James Ellroy : le premier roman que j'ai d'ailleurs lu de lui, Soupe aux Poulets (un titre très 50's dans l'esprit), ne m'a pas totalement convaincu. Mais, et c'est là que c'est très troublant, McBain possède une musique stylistique très personnelle ; de celles qui vous gagnent peu à peu.

Un dialoguiste unique

Avec le temps, son écriture a sans doute gagné en densité... et il a su garder ce qui est SA qualité : un sens du dialogue assez peu commun. McBain sait retranscrire la vérité du vécu, la force des échanges courts mais justes, dans ses écrits.
Roman Noir, le Frumieux Bandagrippe (adaptation d'un poème de Lewis Carroll dans Alice au Pays des Merveilles), Jeux de Mots et Jouez Violons. Quatre polars, quatre derniers billets pour Isola. J'en ai déjà lu/utilisé deux. L'heure est venue de reprendre la route vers Riverhead et Diamondback... en mélangeant le plaisir des retrouvailles et la légère nostalgie de la dernière fois.

Bien à vous,
Benny

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